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LA CONFERENCE FRAGMENTS D'HISTOIRE(S)  par La direction le 2015-04-07

COMPTE-RENDU DE LA CONFERENCE

FRAGMENTS D’HISTOIRE(S)

Archéologie urbaine à Fontainebleau

Sophie Benhaddou

Sophie Benhaddou, responsable scientifique des fouilles et membre de l’Inrap, Institut National de Recherches Archéologiques Préventives, a délivré jeudi 19 mars au théâtre municipal de Fontainebleau une conférence autour des diagnostics archéologiques réalisés dans le centre-ville entre 2012 et 2014.

Suite aux projets d’aménagement et de requalification urbaine prévus par la municipalité de Fontainebleau, l’Inrap est intervenu dans trois lieux emblématiques pour l’histoire de la ville, afin d’explorer quelques parcelles de sites puis si nécessaire, entamer un réel processus de fouilles archéologiques.

L’archéologie préventive consiste ainsi en l’exécution de plusieurs sondages, réalisés à l’aide d’une pelle mécanique, en vue de détecter d’éventuels vestiges archéologiques ; sondages réalisés sur une très petite superficie n’excédant pas plus de 6% de la surface du projet d’aménagement. De plus, l’historique d’interrogation autour du centre-ville est très mince, les recherches ayant évidemment été largement concentrées sur le château. Malgré cela et l’état de la recherche réduite à des données fragmentaires, l’équipe de l’Inrap a toutefois effectué des découvertes aussi étonnantes que passionnantes que Sophie Benhaddou a partagé avec les nombreux bellifontains présents lors de cette conférence.

Introduite par M. le Maire puis par M. Daguenet, historien, Sophie Benhaddou nous a dévoilé les traces de l’histoire de trois sites que nous connaissons tous aujourd’hui, à savoir l’actuel parking Boufflers, la place d’Armes et pour finir la place de la République.

Le portail monumental de l’entrée du parking, classé monument historique en 1987, témoigne de l’existence d’un luxueux hôtel particulier construit dans les années 1540 par un grand architecte italien, avec entre autres, des bains à la romaine et un jeu de paume. Apparaissent également de nombreuses traces des jardins de  Ferrare, qui suscitent beaucoup d’attention chez les chercheurs. Ils ont en effet retrouvé un certain nombre de fosses de plantation ainsi que suffisamment d’indices pour percevoir les allées et créer une restitution de ce qu’a pu être ce magnifique jardin composé de plus de trois mille arbres et particulièrement bien conservé !

Quant à la place d’Armes, des traces de vie gauloise ont été retrouvées grâce à l’analyse de pollens et de débris végétaux très anciens. L’existence de champs de céréales cultivés non loin de cette place en a été déduite. Néanmoins, l’archéologue qualifie ce village de « bourg insaisissable », à cause de l’absence de toute trace de maçonnerie, due à des constructions en bois enfoncées dans le sol. Elle ajoute qu’il reste à découvrir comment ces populations gauloises puis médiévales exploitèrent ces conditions naturelles, liées à la présence d’une large nappe phréatique.

Les diagnostics de la place de la République ont permis de mettre à jour les contours de l’ancien jardin des prêtres lazaristes de la congrégation de la Mission, accolé à l’Eglise Saint-Louis. Outre les fosses de plantation et quelques pots de fleurs retrouvés sur le site, de nombreux éléments de mobilier destinés au service de table et à la cuisine furent découverts. Les archéologues ont même pu déterminer le régime habituel des frères grâce à des résidus culinaires majoritairement composés de volailles, de poissons et d’œufs.

A travers un voyage dans l’histoire bellifontaine, Sophie Benhaddou nous a ainsi rappelé que notre ville était avant tout : UNE FORÊT, UN CHÂTEAU, UN BOURG.

 

 

 

Claire DESBORDES (TL1)

 

 

 

Pour en savoir plus:

A posteriori, afin de compléter ce qui a été dit dans cette conférence, nous avons pu avoir des éléments supplémentaires par Patrick Daguenet, historien, auteur et conférencier.

 

Les fouilles archéologiques ont permis de découvrir, également sur la place d'Armes,  les fondations de maisons du XVème siècle détruites vers 1640, c'est-à-dire bien après la construction du quartier Henri IV qui date de 1609, il semblerait donc qu'à l'origine le bourg et le château étaient collés l'un à l'autre.

 

Que vont donc devenir ces sites ?

- les fouilles de la place de la République n'ont pas permis de trouver de vestiges (éléments de céramiques, semelle, éléments d'alimentation) au-delà du XVIIe siècle (Lazaristes, 1661) ; donc la période qui a fourni le plus d'éléments est celle des XVIIe-XVIII siècles, mais il y a des traces de bâtis du XVIe siècle. Du fait de l'intérêt limité du site sur le plan archéologique, la  Commission a statué pour une non-poursuite des fouilles, et a donc autorisé le creusement du parking souterrain.

 

- les fouilles du quartier Boufflers n'ont pas de vestiges au-delà du XVIe siècle (Serlio, 1542-1546). Cependant du fait de la qualité de conservation des strates du sous-sol et d'un site historique exceptionnel (l'hôtel du Grand Ferrare), la Commission a proposé l'interdiction de toute construction à cet endroit (Quartier Boufflers) avant une étude archéologique plus approfondie. Nous pouvons peut-être espérer faire sortir de terre l'appartement des bains recouvert des fresques du Primatice. Les fouilles ne pourront commencer qu'en 2019, date de fin de contrat avec Interparking.

 

-  les fouilles de la place d'Armes font remonter une présence humaine aux IIe-Ier siècles avant J.-C. (avec certains éléments gallo-romains et carolingiens mais pas assez significatifs pour attester d'une présence continue et permanente durant le Moyen Âge). Étant donné les perspectives très intéressantes du site, la Commission propose de réaliser des fouilles archéologiques préventives sur toute la superficie de la place en cas d'aménagement de celle-ci.

 

Sarah MEUNIER (TL1)